Je suis licencié en droit, et j’ai même été licencié de l’OPAC62 (donc doublement licencié hein, excusez du peu) comme je le raconte dans le texte que j’ai intitulé « Opaque », mais c’est déjà une autre histoire, quoique si j’avais réussi ma maîtrise, cette histoire-là n’aurait peut-être jamais eu lieu. Car en effet j’aurais pu aussi être maître en droit si j’avais réussi ma maîtrise, puisque, après ma licence, j’avais cru bon de m’inscrire en quatrième année de faculté. Aujourd’hui, il paraîtrait qu’en plus de pouvoir être maître en droit, puisque la maîtrise sauf erreur existe toujours, on peut, avec une année de plus, obtenir un master, ce qui me semble-t-il signifie maître en anglais. Plutôt marrant non, puisqu’en somme on pourrait théoriquement être doublement maître de nos jours, une fois en français en obtenant sa maîtrise, et une seconde fois en anglais avec le master. Je ne sais pas vous, mais moi cela aurait plutôt tendance à m’amuser, mais sans méchanceté. C’est juste drôle quand on y pense, voilà tout.
Bref, il aura suffi d’un partiel, le premier de l’année, et de trois petits points de suspension, pour me faire échouer. Car après la mauvaise note que j’avais obtenu à ce partiel, j’ai cessé d’y croire, ayant facilement tendance à baisser les bras quand les choses tournent mal, je l’avoue. En effet, quand la malchance commence à poindre le bout de son nez, n’ayant jamais eu une vocation de Don Quichotte prêt à se battre contre des moulins à vent, lorsque je sens la cause perdue, je préfère laisser tomber, ou du moins ce genre de situation n’est-il pas de nature à me rendre plus combatif, mais au contraire à me décourager. C’est sans doute un défaut, encore que quand je vois certains s’acharner à refuser la défaite au prix d’y laisser parfois toutes leurs plumes, je me dis que savoir renoncer, abandonner, se résigner, accepter de perdre ou d’échouer peut aussi être une qualité, même si en l’occurrence j’aurais peut-être dû m’accrocher un peu plus. Mais bon, ce qui est fait, ne peut plus être changé.
Pour ce partiel, le prof (par ailleurs très bon dans son domaine, mais tout de même beaucoup moins, je trouve, quant à la formulation de ses sujets d’examen) nous avait demandé de ne réviser en gros que la théorie générale des services publics. Pour résumer, s’agissant d’une épreuve de droit public, il était convenu que le sujet du partiel ne porterait que sur les cours relatifs aux activités administratives et aux activités industrielles et commerciales en général des services et établissements publics, en laissant de côté pour le moment, si je me souviens bien, les activités des entreprises publiques dont l’étude était alors en cours.
Le sujet était le suivant : « Intérêt général », « Service Public », « activités proprement administratives », « activités industrielles et commerciales » … : les textes et la jurisprudence permettent-ils, aujourd’hui, de présenter une analyse claire et pédagogique du droit des activités publiques ?
Si dans la copie que j’ai alors rendue, je m’étais limité à ne traiter que de ce qui devait faire l’objet des révisions, comme j’aurais dû le faire, puisque c’était la consigne que le prof nous avait donnée, j’aurais sans doute eu une bonne note, en tout cas nettement meilleure, et j’aurais été probablement encouragé à redoubler mes efforts pour obtenir ma maîtrise, et qui sait peut-être même aller au-delà. Mais voilà, il y eut ces trois petits points de suspension que le prof avait fait figurer l’air de rien dans le sujet (à mon sens à tort), et qui ont hélas réveillé la paranoïa qui sommeillait en moi. Je me suis dit en effet : « Quel salaud, il nous demande de ne réviser que la partie du programme consacrée aux services et établissements publics, alors qu’au travers de ces trois points de suspension, qui en général évoquent une énumération non exhaustive, genre etc..., il nous file un sujet qui porte aussi sur les cours de la partie du programme dont on n’avait normalement pas à nous occuper pour le partiel». Eh oui, c’est vraiment ce que j’ai cru, ce n’est pas une blague … alors que pour le prof, ces points de suspension n’étaient là en fait qu’à titre décoratif, ce que bien sûr je continue de trouver anormal, à cause de la confusion ou du trouble que cela avait créé, au moins dans mon esprit, mais bon puisque c’était fait, il n’y avait dès lors plus qu’à se faire une raison, pas vrai ?
Et voilà en somme comment j’ai réussi à ne pas me faire maître : … plutôt drôle non ? Sans ces trois petits points de suspension, ma vie eut en effet peut-être été toute différente … ou pas, car après tout c’était peut-être l’œuvre du destin, qui sait ? Mais lorsqu’on y songe, à quoi ça peut bien tenir un destin quand même, hein !
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