Pour Gustave, comme l’a écrit Jean-Paul Sartre, l’enfer, c’est les autres. Il ne les fréquente d’ailleurs quasiment pas. Il estime qu’il n’y a rien à attendre d’eux. Ils ne lui ont causé que des problèmes et ne lui ont jamais apporté la moindre solution à aucun d’entre eux. Il lui a toujours fallu aller trouver ces solutions lui-même, le plus souvent dans son for intérieur. En outre, il dit se sentir bien avec lui-même. La solitude ne lui pèse aucunement, mais il est vrai qu’il ne vit pas vraiment seul, même s’il est célibataire et sans enfant. Il côtoie malgré tout au moins de temps en temps des personnes gravitant autour de lui dans le cadre de son travail, quand il fait ses courses, etc. Il ne sait donc pas exactement ce que cela serait d’être vraiment seul.
Ayant peur de voyager en avion, il évite au maximum de prendre ce moyen de locomotion, mais il lui arrive néanmoins de devoir s’y soumettre pour de longs trajets. Et justement un tel déplacement est prévu la semaine prochaine et il commence à angoisser surtout avant d’aller se coucher. Il fait des cauchemars et appréhende de se mettre au lit.
Cette nuit au cours de son sommeil, il s’est réveillé en sueur, plus agité et effrayé que s’il avait vu un fantôme, ou même plusieurs. Il venait de rêver avoir été l’unique survivant d’un crash aérien et s’être retrouvé seul sur une île déserte, et cela lui avait donné des sueurs froides, alors que pourtant il disait chérir la solitude plus que tout. Mais là dans son cauchemar, il était vraiment seul, sans même personne à croiser, à voir en allant se promener, en allant au cinéma ou encore au restaurant, etc. Il avait goûté au plus profond de lui à la sensation d’être vraiment seul, et cela lui avait provoqué une angoisse si grande qu’à son réveil en sursaut, il ne comprenait plus pourquoi il avait pu à ce point tant apprécier la solitude.
Le lendemain et les jours suivants, quand il était amené à sortir de chez lui, il ne regardait plus les autres de la même manière. Quelque chose avait changé : il continuait certes à penser que l’enfer, ça pouvait parfois être les autres, mais il semblait avoir compris que sans eux, ce ne serait pas le paradis non plus.
Peut-être pourrions-nous y voir là tout le tragique de la condition humaine se mit-il à penser : si l’on ne veut pas s’entretuer, on a pas le choix, il nous faut cohabiter, que l’on s’aime, que l’on se déteste, que l’on soit du même milieu ou complètement différents … on doit vivre ensemble, mais bon sang que ça peut être dur, se dit-il songeur. Alors est-ce au fond à cela que sert l’humour : à tenir en essayant de donner aux tragédies des allures de comédies ?
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